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Cearriveenfrance
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Chambre 15

Chambre 15

 Toc, toc

- puis-je enlever le plateau ?

- non, non, laissez, je boirai un dernier verre dans un moment. Ce vin est divinement bon. Y'a pas à dire, la Bourgogne est bien le meilleur vignoble français.

- vous n'allumez pas la télé ?

- non ! Et puis, si, je vais regarder le match de rugby Béziers-Lourdes. Lourdes me portera peut-être chance.

Finalement, ce match n'est pas intéressant. Je vais plutôt écrire à ma petite chérie.

****J'aime ton corps, la joie qui coule en moi quand je détiens ta bouche, la possession qui me brûle de tous les feux du monde, le jaillissement de mon sang au fond de toi, ton plaisir qui surgit du volcan de nos corps, flamme dans l'espace, embrasement.****

Ca devrait lui plaire. Je n'en reviens pas d'avoir une telle prose.  Même moi, je ne me connaissais pas ce talent de poète. La campagne m'inspire, vraiment. Bonté, le repas de midi a été trop copieux, les asperges en rémoulade étaient délicieuses, ainsi que le gigot. Par contre, les flageolets me donnent des flatulences. Je ne vais tout de même pas écrire ça à ma chère, très chère chérie.

****Ô désir de tes bras, de ton être, du feu et de la houle, du cri qui nous dépose aux bords d'un autre monde***

C'est quand même beaucoup plus beau. Ca devrait lui chavirer le cœur.

****Ma très chère Anne, je regarde par la fenêtre et je vois de plus en plus de résineux qui remplacent les chênes.

Ca me désole quand je pense à nos promenades langoureuses sous les chênes centenaires.****Chambre 15

**** J’aime mes mains qui ont caressé ton corps, j’aime mes lèvres qui ont bu en toi.****

Quelle prose, vraiment, je ne me reconnais pas ! Ca doit être les événements qui m'inspirent.

****« Si tu savais, mon Anne, la plénitude et la confiance qui m'ont habité grâce à toi. Confiance dans la générosité de la vie, plénitude de mes facultés portées au meilleur d'elles-mêmes et dans une incroyable harmonie. Nos rencontres, nos promenades, nos tendresses n'ont pas été que des échanges entre nous. Elles ont été pour moi une façon d'appréhender le monde, les choses, les êtres, l'action et d'une certaine manière - l'expression est sotte - mon âme. Tu m'as délivré de ce qui m'enrayait, me rouillait, me diminuait. Je me suis débarrassé de tout calcul. Je n'ai obéi à aucune stratégie amoureuse. Pour mieux t'aimer, j'ai pris garde à ne pas aimer plus que toi mon bonheur et mon amour de toi. Je ne crois pas avoir jamais plus sincèrement et plus sérieusement recherché la perfection d'un sentiment et d'un accord.****

Bonté, je n'en reviens pas d'avoir un tel talent. Ca doit être le petit vin de Bourgogne apporté par Ginette qui m'inspire. Oh ! le camembert est aussi à tomber par terre.

****Très chère Anne, j'ai devant les yeux une carte de géographie Vidal-Lablache. Dire que, d'ici peu, tout ça sera à moi, si dieu le veut ou si mes sbires ont bien fait leur boulot. Hélas, tu ne seras pas à mes côtés. Mais, tu seras toujours présente dans mon coeur, mon amour. Nous arriverons bien à trouver quelques heures pour nous échapper dans les profondes forêts du Morvan.****

 

****Je te quitte très chère Anne. J'entends les cris de la victoire. Il faut que je m'habille, je suis en pyjama. Je m'en vais affronter et remercier MON peuple. Dorénavant, nous ne pourrons plus nous voir autant, la charge qui m'attend ne nous en laissera guère le temps. Mais, nos échanges n'en seront que plus intenses. Ce soir, j'entre dans l'histoire. Imagine ma chérie, que, dans 100 ans, mes lettres soient lues par des milllions de gens ! On saura, à ce moment-là, que j'étais un homme comme les autres, amoureux, déchiré entre 2 femmes - enfin, les deux qui ont compté le plus pour moi - Une qui aura été à mes côtés au début de mon ascension et que je ne pouvais décemment laisser choir et toi, très chère, qui aura été mon petit oiseau caché, mon soutien, mon amour, la femme de ma vie.****

Toc, toc....

- Entrez.

- VOUS ETES ELU

- c'est mieux que le contraire.

Nota Bene : notez que le style lyrique n'est pas de moi. Je pense que vous saurez faire la différence entre ce qu'a écrit ce grand homme et mon petit style, grand homme dont vous aurez deviné, je suppose, l'identité et dont Gallimard va célébrer le centenaire de sa naissance en publiant les lettres d'amour de cet homme à sa favorite. J'ai aussi de temps en temps assaisonné les propos de ce grand homme à ma propre sauce. Saurez-vous voir la différence ? (aïe, aïe, avec les fautes, les premiers lecteurs auront vu. J'aurais pu dire que je l'ai fait exprès ; même pas)...

Si je me suis permis de jouer avec les mots, sensés être écrits par cet homme, c'est que j'estime que ce genre de prose aurait dû rester dans le domaine du privé. Quoique, cet homme à l'insatiable appétit sexuel ne s'embarrassait guère de fidélité. Aurait-il pu être machiavélique à ce point, pour jouer avec les sentiments d'une femme qui l'aimait et l'admirait, pour se l'enchaîner à vie ? Mais, avec lui, tout était possible. il avait tant de facettes. Je crois qu'il avait envie de marquer de son empreinte l'histoire, comme Napoléon ou Alexandre le Grand.

J'ai tiré certains renseignements d'un article du Monde. Vous pourrez en avoir un aperçu ci-dessous.